Invitée sur ce blog, envie d’y mettre mon grain de sel, mais angoisse de la page blanche… Ayant manqué le départ, j’ai parcouru l’ensemble en quelques jours. Vision globale et parcellaire. Outre tous les détails que j’aurais pu relever, j’y ai lu une recherche sur la place et sur la distance (à l’autre s’entend) qui me parle.
Pas question de me cacher derrière les propos de tiers : offrir ses choix littéraires est aussi une façon de se dévoiler !
Dans « À quelle heure passe le train », Marie Depussé converse avec Jean Oury. Dans ce passage il est question de Perceval, « du musement de Perceval ». Marie Depussé a relu Chrétien de Troyes et rafraîchit la mémoire de Jean Oury : « un jour où tu n’auras pas le temps, tu devrais le lire, c’est magnifique ». ( Ça pourrait s’appliquer justement à ce livre dont je parle : un jour où vous n’aurez pas le temps… )
Après une douce nuit et quelques errances, Perceval « s’oublie dans son penser », absorbé qu’il est dans la contemplation de tâches de sang laissées par des oies sauvages sur la neige (les couleurs lui rappellent sa bien aimée)…
« Dans la cour du Roi Arthur il y a, comme partout, des fous moyens, des chevaliers un peu bêtes et excités, qui proposent d’intervenir. Le premier s’approche de cet homme « endormi » debout, et lui intime à voix forte de se diriger vers le château du roi. Comme Perceval ne répond pas il fonce sur lui, la lance haute, et Perceval, lui jetant un coup d’œil, d’un revers de lance l’abat. Le deuxième fera pareil et sera étendu de la même façon. Enfin, Gauvain, le subtil Gauvain, s’approche, et invite calmement Perceval, si cela lui convient, à le suivre jusqu’au château. Le jour a un peu baissé, on distingue moins le sang sur la neige, et Perceval sui aisément cette invitation calme à passer en compagnie d’autres humains l’après-midi.
Jean Oury : « Gauvain, le subtil Gauvain… Qui est Gauvain, ici, dans notre histoire ? Il faudrait définir la fonction de Gauvain, l’oblique, en psychiatrie.
[…]
Que j’aimerais, au moins quelquefois si ça ne peut être tout le temps, être Gauvain… Emprunter l’oblique, inviter calmement tel élève rêveur ou « ailleurs » de quelque façon que ce soit (bavardage, refus, pitreries…) à rejoindre le groupe.
À défaut, j’ai souvent le plaisir de voir à l’œuvre de petits Gauvain de 5 ou 6 ans : parfois de façon durable, parfois pour 5 minutes et dans telle situation avec tel camarade…
J’ai moi-même rencontré Gauvain, sous les traits d’une jeune femme dont j’ai oublié la couleur du liseré à la poche de sa blouse blanche… Dans un moment délicat sinon difficile, pour tout dire une mastectomie, elle a compris la très grande nécessité de me laver les cheveux ! Je ne pouvais prendre de douche, encore moins lever le bras et mon dernier shampoing remontait à … 48 heures ! Sans compter la Bétadine qui avait suivi ! Il y avait donc urgence, et elle le comprît ! J’ai donc eu droit à ce plaisir suprême du shampoing tout en restant dans mon lit (et elle ne fit même pas sortir mon mari ni ma mère ! Une faute, non ?)
Du Gauvain aussi, dans ce même service, quelle chance, chez une des surveillantes, qui enrobait de douceur chacun de ses propos…
Héros d’un autre âge ? Et si, justement, en ce jour de (g)rève il devenait urgent de muser ?
Coralament,
cl