dimanche 30 mars 2008

mon moi de mars avec Mélanie

Le co-voiturage a des vertus insoupçonnées. La première est qu’il vous empêche de vous débinner quand tout semble s’écrouler autour de vous.
J’ai commencé ce stage en “CHIR A” (Chirurgie viscérale et vasculaire) par un uppercut matinal. Je savais ma vue approximative mais en choisissant cette reconversion professionnelle, je n’avais pas noté de désagrément majeur. Et là en faisant le relevé des températures de chambre en chambre : bing! Impossible de voir le gradient sur le thermomètre. Ou du moins un grisé imprécis entre la numérotation et ce liquide argenté (qui n’est pas du mercure) . Je ne vous dis pas ce sentiment de panique, un rappel de 380 volts dans tout le corps. Tout se fait lourd, immensément lourd. Bien sûr, j’ai joué carte (canne) blanche avec ma collègue en lui énonçant le problème et j’ai senti dans son regard une soudaine lassitude : style “c’est bien mon jour”.
Le truc chez moi est lorsque je plonge, j’y vais à fond.
J’ai aligné les bourdes saupoudrées sur chaque nouvelle-nouveau collègue si bien que j’ai rapidement mesuré leur lassitude, voire leur répulsion à approfondir la question. Le premier vendredi est arrivé à la vitesse grand V . Vaincu et lessiV!
Si ce n’étaient, si ce n’étaient ces brefs moments dans la voiture sur ce trajet Cannes -Grasse et retour où la voix chaude et rieuse de Mélanie tentait de me montrer les bons côtés à ne pas escamoter.
Non pas de la méthode Coué, à grands coups de cela ira mieux demain mais une écoute, une simple écoute pour retrouver un souffle. La parole de Mélanie m’abreuve limpide. Elle n’est pas nourrie de faux semblants, de double sens. Elle parle de tourments, de blessures, elle parle d’énergie et de fers rouges sur l’âme. J’écoute souvent son flux non préoccupé de chercher à la source, tous les pourquoi induits.
J’ai la chance de connaître quelques êtres où l’échange peut ainsi se déployer et cela m’a toujours été nécessaire.
Nous avons 17 ans de différence. Cet espace temps ne signifie rien sur le plan de l’acuité intellectuelle, juste un peu plus sur un temps autre, celui qui m’a tramé cette “texture bizarre”, comme étranger à soi-même.
Mélanie n’émet pas de jugement de valeur sur l’énoncé de vos paroles. Elle les laisse s’envoler et permet ainsi d’en saisir l’écho.
J’ai du répéter de nombreuses fois dans ces aller-retour, des épisodes où sous le simple regard d’une observatrice ou d’un observateur, j’avais ce sentiment de me liquéfier (pas fier du tout), de glisser dans des états hypnotiques détachés de toute réflexion. Ou mon énervement “retenu” à m’entendre appeler “jeune homme” alors qu’à 56 balais, je devais être le plus âgé du service, mis à part les patients. Et je me demandais ce que pouvait signifier une telle “transparence” chez toutes ces spécialistes des 14 besoins de Virginie Henderson, aux diagnostics exercés?
L’idée de l’ennuyer ne m’est même pas venue à l’esprit.
Aujourd’hui le stage est terminé. Mes notes sont lamentables mais je ne les conteste pas. L’appréciation générale précise : “Ponctualité respectée. Très peu de compétences acquises à ce jour, la discrétion ne doit pas être un frein à la formation, la curiosité intellectuelle permet d’avancer et d’évoluer dans le métier. Stage très moyen. Des efforts à faire”.
J’essaie de comprendre. J’ai quelques intuitions.. Bizarrement, je suis content de n’avoir pas “fui”. J’ai pu observer le fonctionnement d’un service hospitalier, de voir des êtres s’impliquer, se mobiliser, donner le meilleur d’elles mêmes (d’eux mêmes) pour résoudre des questions où la souffrance est toujours présente. Je dis des êtres pour souligner cette primauté de leur humanité sur leur savoir “technique” ; qu’elles/ils soient infirmières ou aides-soignantes (aides -soignants) et j’ai gagné une véritable amie!
dimanche 30 mars 2008 : 37° 2 au matin

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