mercredi 26 décembre 2007

STAGE NUMÉRO DEUX

La jeune femme qui m’écrivait de Cordoba me questionnant sur ce que je cherchais dans ce métier & si finalement ce n’était pas moi qui était aidé, flirtait avec la réalité.
En clôturant ce deuxième stage en gériatrie s’est glissé un début de réponse. Il faut dire que l’activité a un effet loupe. Les corps sont au plus prés, les visages aussi. L’effet loupe sur l’humain. L’effet questionnant, l’effet miroir.
Mon propos n’est pas d’aborder la souffrance, la solitude, ces moments fin de vie. Mes propos ne sont pas de m’étendre sur l’empathie, la compassion.
J’ai donc passé 4 semaines auprès de personnes de plus de 80 ans, tentant d’améliorer ma compréhension, mon attention. Tentant d’être suffisamment prévenant pour ne pas accroître des difficultés à se mouvoir, à respirer, à vivre ce jour de plus & suffisamment subtil pour enfin percevoir combien aider n’est pas de se substituer à l’autre.
Je suis un garçon ingénu. La clairvoyance n’est pas dans ma gamme perceptive. C’est peut-être ce qui m’a préservé de la folie & de la mort. Ceux-celles surtout qui m’ont approché, connaissent mon tatouage.
Certaines l’ont vu avant que je ne le découvre. Il était sous mon regard & bien sûr si brûlant, si irradiant que.
Jusqu’à ce jour où « mon père » dans un aveu inopiné m’avoue qu’il ne l’était : croyant que je le savais !
Marcel Pagnol aurait trouvé matière à synopsis. Entendre cela dans sa vingt neuvième année vous offre d’étonnants flashes back. Je crois que je devins très cruel. Si des êtres bienveillants ne m’avaient entouré, j’eusses pu devenir un assassin.
L’exil prit soin de moi & m’apprit aussi que je n’étais pas meilleur, blessant, trahissant à mon tour des êtres qui m’aimaient
Je regarde les gens dans les yeux. Dans leurs yeux, je cherche ce qui me préoccupe, ce qui est pour moi : mystére. Je cherche leurs peurs & mes peurs, je cherche aussi ces moments sans masque. Rémission partagée. Dans ce prisme du regard, les corps prennent une autre mesure, une autre densité & convoquent attention & respect.
Pendant ces quatre semaines, j’ai croisé des personnes parfois perdues. Dans ces défaillances de la mémoire qui ouvrent sur des états si insécures. Ces épreuves me laissent sans voie, demeure un incessant questionnement sur ces étapes de la vie.
Ce vendredi 21 décembre 2008, j’ai serré « ma mére » dans mes bras, sans effort, simplement. C’était la première fois !

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