mercredi 26 septembre 2007

POINT DE VUE , DEUX FEMMES.

Pas d'enfant dis-je
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jeudi 13 septembre 2007 :: Paysages intérieurs :: # 134 :: Fil RSS

Le désir d'être mère m'a parfois traversée, mais j'ai eu assez tôt cette conviction que je ne désirais pas d'enfant. D'enfant je n'en ai pas conçu, à présent je n'en aurai plus et je suis plutôt contente de penser que ce ne sont pas les circonstances qui ont décidé pour moi. Je peux dire aussi que je n'ai pas de regrets et, à moins de changer du tout au tout, je ne crois pas souffrir d'un manque en vieillissant. Ma vie, c'est à moi de la faire.

Que dire de mon non-désir d'enfant ? Ce n'est pas facile. Ce billet est sur le feu depuis un petit moment. Je le reécris, je l'ai trouvé trop abrupt alors que l'ambivalence est aussi présente. Mais là, j'ai envie de le larguer tel que. J'ai bloqué aussi car j'ai souvent été interpellée, en plus par des personnes que cela ne regardait en rien, alors que le désir d'enfant reçu comme "naturel" et comme une expression de l'amour, n'est guère questionné. J'ai eu droit aux bons conseils, à la suspicion et à la fausse compassion. Sauf à revendiquer je n'ai pas d'enfant parce que je n'en veux pas qui cloue définitivement le bec aux bonnes âmes, mais n'est pas toujours facile à affirmer.

Préciser d'abord quand même que je n'ai jamais pensé qu'un enfant serait pour moi une contrainte m'empêchant de faire ce que j'avais décidé (et pourtant, c'est). Et que j'avais peu de réticences à projeter un enfant dans un monde qui n'a rien d'accueillant.
Par contre, avoir un alien dans le ventre ne me disait rien du tout, je me demandais comment j'allais supporter une vie en moi, je n'ai pas d'attirance pour l'état de femme enceinte. Ni pour les bébés dont la dépendance me met mal à l'aise.
La maternité triomphante, la glorification de l'enfant support d'accomplissement de soi, la fadaise de l'instinct maternel m'exaspèrent. Mais pas plus finalement que toutes ces représentations de la femme - mére, superwoman, amante, épouse, belle, jeune... -, qui nous sont jetées en pâture et qui sont autant de carcans où s'emprisonner, d'infernales contradictions où s'enferrer.

Par ce refus de la maternité, j'ai évidemment jugulé une angoisse. Séparée avec violence de mon père quand j'avais 3 ou 4 ans, confrontée à une histoire familiale où l'abandon a tapé fort, ayant symbolisé la déchirure par ma naissance, poursuivre la chaîne des ruptures me faisait peur. J'avais cette peur que l'arrivée d'un enfant ne fasse éclater mon couple mais surtout que dans ma violence, enchaînée dans l'absurde de la répétition, je ne coupe irrémédiablement les liens entre l'enfant et le père. J'ai souhaité très vite fuir la vie de famille pour ne plus avoir à en souffrir. Ne m'inscrire dans aucune lignée, ne pas me marier, ne pas entrer dans une autre famille, ne pas "avoir" d'enfants. Sans doute aussi que, ayant toujours plus ou moins pensé que ma mère m'avait abusivement privée de mon père, je n'étais pas mécontente de la priver à mon tour des petits-enfants qu'elle espérait. Trancher court, toujours. Ne pas oublier, ne pas pardonner, souvent.

Mais c'était aussi bien sûr une affaire de couple. J'ai rencontré jeune celui qui a fait que nous avons été ensemble à deux et si bien ensemble, si proches. Peut-être n'a-t-il pas voulu faire valoir son désir sur mon non-désir car il a toujours été attentif à ne rien m'imposer, mais il n'a pas non plus cherché à me rassurer et, investi tout entier dans l'écriture, il ne s'est jamais montré plus impliqué que ça dans la paternité. Nous ne nous étions quand même pas rencontrés par hasard. Et qu'aurions-nous fait d'un enfant entre nous ? Nous n'en n'avions pas besoin. En quête chacun de nous-même, nous trouver et nous comprendre l'un par l'autre était ce qui nous importait. C'est bien grâce à lui et avec lui que j'ai pu accepter mon histoire, ne plus en avoir honte, dénouer certains noeuds. Nous aimions tant nous parler et être l'un avec l'autre. C'est l'enfant qui était en chacun de nous que nous avons aussi aimé et fait revivre.

Et puis, et puis, l'esprit de révolte contre ce qui est établi m'a toujours animée pour le meilleur et le pire, et je lui paie peut-être un tribut. J'ai baigné dans la mouvance féministe, j'ai accompagné les revendications des féministes. C'est pour moi une victoire et une jouissance de pouvoir poser mes actes et faire mes choix de femme en essayant de ne pas me plier aux contraintes morales, religieuses, sociales, machistes. Je veux vivre dans la conscience que mon corps est à moi, que ma sexualité est à moi, que je peux dire oui ou non à un homme, oui ou non à la maternité, à la contraception, à l'avortement.

Les jugements sur le refus d'enfanter me font toujours horreur, la non-maternité n'est quasiment abordée que sous l'angle de l'a-normalité. Que l'on puisse taxer les femmes qui ne désirent pas d'enfant d'être égoïstes, narcissiques, de fuir les responsabilités, de vouloir rester les filles de leur mère, et cerise sur le gâteau de ne pas être épanouies en tant que femmes, d'être qui sait frigides ou nymphomanes, et au final de se trouver carrément à l'ouest... continue à m'enrager.

Je voudrais tout simplement entendre que désirer ne pas faire d’enfant c’est toujours désirer, ce n'est pas refuser un désir d'enfanter qui serait lui "normal," ce n'est pas une décision qui vient en négatif, c'est exprimer autre chose, vivre autrement, avoir d'autres engagements, d'autres objectifs de vie. Merde, bien avant d'être une mère, une femme est une femme.

En écrivant, je pense à Edith Vallée qui a travaillé sur le sujet et écrit Pas d'enfant dit-elle, dont j'ai perdu la trace. Sait-on jamais Edith, si tu passes par ici, contacte-moi, nous nous reconnaitrons vite, j'aimerais tant que l'on puisse se revoir ! Toi qui t'es toujours insurgée contre ces fausses évidences qui assimilent la femme à la mère.
Merci aussi à Angela Iacub, à Virginie Despentes, à tant d'autres qui réfléchissent sur les voies de la féminité et de la masculinité.

PS - Si quelqu'un me parle de mon pseudo, je l'étrangle : meerkat ne renvoie pas à mére-cat, pas du tout, ça se prononce mir-cat. rl-)
(encore que mère d'un enfant chat aurait pu me convenir, il aurait vite su s'assumer et je n'aurais pas eu à l'envoyer à l'école !).

Edit : des liens vers des billets sur d'autres expériences tournant autour de ces questions, ave




dimanche 8 avril 2007
Les auxiliaires de vie
http://laporteouverte.blogspot.com

J'entends souvent dire que d'aucuns ont tout pour être heureux... Mais d'aucuns ne le sont pas. La panoplie du tout heureux est caricaturale : un métier, une âme soeur, un toit, des enfants. Il y a aussi des accessoires au bonheur en kit à monter soi-même : la belle voiture, le chien, le home cinéma, la toile de maître, les vêtements de marque, les dîners à la table des grands chefs... Il en est qui ont tout, tout pour être heureux. Et qui ne le sont pas. Il ne faut pas confondre l'être et l'avoir... Est-ce cela qu'on appelle des "auxiliaires de vie"?
Le bonheur est un état étrange parce que, souvent, on le reconnaît quand il n'est plus, qu'il est déjà parti, passé, évanoui. On l'a caressé sans même le savoir, on l'a vécu sans le respirer. "En ce temps-là, on était heureux !"... mais le savaient-ils, en ce temps-là ?
Le bonheur se cache dans une foule de petits riens, il arrive par petite touche. Une petite main qui se loge dans la vôtre, un mot doux qui se glisse dans votre oreille, une soirée à deux à vibrer des mêmes accords, un rire qui se passe comme un virus à tous les membres de la famille.
Il existe une foule qui a tout pour être heureuse. Et qui ne l'est pas. Elle a au fond d'elle une vague de tristesse qui ne la quitte pas, une angoisse de cette vie qui ne fait que passer et qu'on ne retient pas parce qu'il n'y a rien à retenir dans cette suite de jours semblables... Vague à l'âme qui fait remonter les souffrances, les absences, les rancoeurs. Il existe une foule qui ne se trouve pas belle alors qu'elle n'est pas laide, qui ne se sent pas à la hauteur bien que marchant sur la pointe des pieds... mais c'est juste pour ne pas faire de bruit.
Le malheur des autres ne soigne pas sa propre mélancolie. Son vide, sa solitude, son incapacité à se sentir léger sont des fardeaux personnels.
Je suis convaincue que le bonheur n'est pas dans l'Avoir. Le luxe, l'argent, le faste ne m'attirent pas.
Le bonheur est dans l'Être, dans sa conviction d'avoir à savourer les instants qui ne dureront pas : pouvoir appeler ses parents quand on en a envie, leur demander tous les Pourquoi qui ont encore une ombre, entendre des cris traverser les couloirs de la maison avant qu'elle ne soit trop silencieuse, ne pas avoir à se demander de quoi demain sera fait, pouvoir encore rêver à des rencontres, des voyages ne fussent-ils qu'intérieurs, pouvoir lui dire encore Je t'aime, pouvoir marcher très vite pour se sentir léger, être lue, un peu plus chaque jour, ne s'inquiéter de rien. Tout cela n'a pas de prix puisqu'il ne s'achète pas. Le bonheur est dans l'insouciance.

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